Mike Goldsmith
(EDP Sciences, 2023, 168 p. 12€)
Observons une «ola» dans un stade : chaque participant se lève juste après son voisin ; ses seuls mouvements sont verticaux, mais l’ensemble montre une vague, qui se déplace latéralement dans les tribunes. C’est l’essence d’une onde. De la même façon, observons la mer, loin du rivage : la crête de la vague avance, mais le ballon qui flotte ne bouge que de haut en bas. Ecoutons le son d’une cloche lointaine : le son nous parvient, et pourtant l’air qui le transporte reste immobile. Les ondes sont des entités fascinantes et omniprésentes. Mike Goldsmith, astrophysicien et acousticien, nous présente ce monde captivant dans un petit livre de quelque 150 pages.
Les ondes les plus faciles à observer sont les vagues de la mer : elles naissent de petites perturbations créées par le vent, qui se transmettent de proche en proche et peuvent voyager des milliers de kilomètres durant des semaines. L’eau ne suit pas le mouvement. Seule l’onde se déplace. L’auteur explique les schémas complexes d’interférences entre les vagues de vitesses différentes.
Il décrit les types de vagues, leurs formes selon une courbe mathématique appelée «trochoïde», les tsunamis et les marées, qui sont aussi des ondes.
Les ondes sonores résultent de petites variations de pression de l’air, ou de toute autre substance, qui se propagent de proche en proche. La hauteur du son, plus ou moins aigu, capté par notre oreille, correspond à la fréquence de ces variations (entre 20 et 20 000 par seconde ou hertz). Notre système auditif est incroyablement performant. On peut percevoir 5000 hauteurs de sons distinctes (et seulement 128 couleurs). On peut détecter un son infime qui déplace notre tympan d’un diamètre d’atome ! Les multiples ondes sonores qui nous atteignent simultanément ne se mélangent pas et on peut les identifier individuellement.
Un fait intrigant : bien qu’inaudibles, les infrasons produisent sur nous des effets émotionnels, attestés expérimentalement, mais inexpliqués.
L’auteur explique les effets du déplacement de la source sonore tels que l’effet Doppler, mais aussi le claquement d’un fouet, qui n’est autre qu’un bang supersonique !
La Terre est secouée par les ondes. Un glissement soudain de plaques tectoniques à 700 km sous terre déclenche des trains d’ondes destructrices dans les couches élastiques du manteau terrestre, provoquant un tremblement de terre. On scrute les ondes sismiques pour surveiller, mais aussi cartographier, notre sous-sol.
L’être humain n’échappe pas aux ondes. Le cerveau émet des ondes cérébrales de quelques hertz (similaires à celles de la pieuvre !). Le cœur contient un oscillateur naturel. Le tube digestif est agité par une ondulation qui se propage de la gorge au rectum, selon un rythme circadien. Nos jambes sont des pendules : la marche synchronisée sur leur fréquence de résonance est la plus efficace.
Les ondes électromagnétiques constituent le plat de résistance du livre. A partir de ses équations reliant les champs électrique et magnétique, Maxwell postule l’existence de ces ondes (1865). La lumière en fait partie ; avec son éther, une substance imaginée depuis des siècles comme support matériel de ses vibrations, Hertz produit en laboratoire une onde radio prédite par Maxwell (1886). En 1905, Einstein donne le coup de grâce à l’éther et affirme que les ondes électromagnétiques peuvent exister dans le vide, sans support matériel.
L’auteur expose les particularités de chacune de ces catégories d’ondes : radio, micro-ondes, infrarouge, lumière, ultraviolet, rayons X et rayons gamma.
Les travaux de Planck sur les quantas (1900), ceux d’Einstein sur l’effet photoélectrique (1905) et ceux de de Broglie sur les «ondes de matière» (1924) sonnent finalement le glas du modèle ondulatoire de Maxwell. Dans la réalité, ces ondes sont des flux de particules, les photons, régis par la mécanique quantique, que l’auteur nous présente brièvement. Le physicien américain Richard Feynman a pu rendre compte de tous les comportements de la matière et de l’énergie sans parler d’onde d’aucune sorte.
Le modèle ondulatoire doit être abandonné comme image de la réalité, mais il reste un outil de prédiction puissant et indispensable du comportement des ondes électromagnétiques.
Les ondes gravitationnelles sont les petites dernières de ce vaste panorama. Prédites par Einstein, elles ont été détectées à partir de 2016, au prix de véritables prouesses techniques. Elles permettront d’observer des évènements remontant jusqu’au Big Bang, car non sujettes à l’opacité du début de l’Univers (380 000 ans). Le projet LISA prévoit d’installer trois satellites détecteurs dans l’espace. Une nouvelle branche prometteuse de l’astronomie est ouverte.
Ce livre est très dense en informations et sa lecture demande une bonne concentration. Les explications sont claires et plus physiques que mathématiques. L’ouvrage est, de ce fait, ouvert à un large public.