
Une proposition saugrenue et inquiétante du ministre de la santé américain Robert Kennedy Jr pour lutter contre la « grippe aviaire » aux États-Unis : laisser le virus se propager pour sélectionner des volailles immunisées.
Une telle proposition témoigne d’une méconnaissance totale de la panzootie de peste aviaire qui sévit actuellement aux États-Unis. Elle est due à un virus influenza A hautement pathogène (IAHP) qui provoque une septicémie rapidement mortelle pouvant atteindre l’ensemble du troupeau. Avec un taux de mortalité proche de 100% avec ces virus IAHP, il est utopique de vouloir garder les rares volailles survivantes pour sélectionner des sujets immunisés dans un système d’élevage avicole qui pratique le « tout dedans-tout dehors ».
Au contraire c’est favoriser l’extension de la maladie dans le pays. Ce virus ne connaît pas les frontières car il touche aussi les oiseaux sauvages qui favorisent sa propagation. L’arrêt des mesures sanitaires limitant la contamination des élevages aviaires serait une véritable catastrophe pour les éleveurs : pertes économiques par l’augmentation des élevages atteints et la mortalité animale, perte d’une sélection génétique dans certains élevages de reproducteurs (dont les lignées de grand-parentaux). Au niveau international, les produits avicoles ne pourraient plus être exportés.
Économiquement, les consommateurs seront également concernés. Actuellement les produits avicoles ont augmenté sur le marché américain notamment les œufs (d’où la nécessité d’en importer). Ce déficit s’accentuera obligatoirement pour les œufs comme pour la viande.
Même si actuellement il n’y a pas de risque de pandémie lié à un virus de la peste aviaire car il n’y a jamais eu de contamination interhumaine, il n’est pas souhaitable de favoriser la multiplication d’un virus qui peut muter et favoriser ainsi l’apparition de nouveaux variants.
Il faut espérer que la proposition désastreuse du ministre Robert Kennedy Jr ne sera pas appliquée.
Jeanne Brugère-Picoux
Professeur honoraire de pathologie médicale du bétail et des animaux de basse-cour (Ecole nationale vétérinaire d’Alfort), membre de l’Académie nationale de médecine, présidente honoraire de l’Académie vétérinaire de France
Texte publié le 27/03/25